MENU
Retour aux articles

Théâtre de marionnettes

En zappant un soir, je me connecte à l’émission « Devoirs d’enquête » .

La voix off expose la stratégie d’un certain David qui abuse de jeunes filles contactées via les réseaux sociaux. L’enquête analyse les stratégies de l’infâme de manière très approfondie.

Il les choisit à partir de leur profil et des informations que ces « malheureuses »(victimes) et peu méfiantes jeunes femmes affichent sur leur adresse sociale.

Il les appâte en leur proposant des jobs d’hôtesses dans l’événementiel, engage le dialogue et les leurre en utilisant un pseudonyme féminin : Hélène ou Elena pour les sécuriser.

Intéressées, les jeunes femmes mordent à l’hameçon et s’enferrent dans un processus où David commence par les violer et ensuite les force à se prostituer en les menaçant de tout dévoiler au grand public via les réseaux sociaux.

Il finit par être arrêté, jugé et emprisonné.

Le commentaire final déconseille aux jeunes filles de se dévoiler sur le net et de s’engager avec des inconnus, ce qui est un minimum d’un point de vue de survie strict.

Si l’enquête a décortiqué le comportement crapuleux et manipulateur du David en question, il est surprenant que celle-ci s’y confine et que les interviews des jeunes femmes se limitent à décrire les évènements sans en approfondir la signification.

Plusieurs plaintes ont été déposées contre David mais une seule de ses victimes (cibles) s’est portée partie civile.

Dans ces drames, il y a toujours deux protagonistes. Si le rôle de David (et je ne lui accorde aucune circonstance atténuante sociologiquement) est celui du manipulateur, du prédateur, il est nécessaire que quelqu’un joue celui de la proie.

Un quidam ne peut jouer le rôle du marionnettiste que si un ou plusieurs autres jouent le rôle de la marionnette.

Quelles sont les raisons qui poussent un être humain à entrer dans le rôle d’une marionnette?

Au décours des interviews, la plupart des jeunes femmes – dont la plus jeune est âgée de 15 ans au moment des faits – ne comprennent pas comment cela a pu leur arriver, comment elles ont pu ne pas sentir le piège que David était en train de tisser autour d’elles et dont elles n’ont pu se dépêtrer par la suite.

Le rôle du marionnettiste importe peu car un manipulateur est facilement démasquable.

Par contre, combien de jeunes filles ne tendent-elles pas et, cela en toute inconscience, les fils vers le marionnettiste qui n’a plus qu’à leur imposer leurs gestes, une fois les fils accrochés à son croisillon.

Elles font remarquer que dans leur milieu familial, elles n’ont pas été acceptées par leur mère, ni reconnues par leur père.

Or dans la nature hostile, un petit qui n’est pas reconnu, en particulier par sa mère, est un petit en danger de mort car il n’est ni nourri ni protégé et, par conséquent, il est ou devient une proie facile pour le prédateur.

Pour des raisons que nous ne développerons pas ici, ces malheureuses jeunes filles n’ont pas bénéficié de la reconnaissance de leurs parents (sans que ceux-ci aient la moindre conscience de leur propre comportement). Elles ont éprouvé le besoin de rechercher cette reconnaissance ailleurs, de « s’agiter » pour être vues par d’autres. Parmi ces autres se trouvent aussi des prédateurs.

Jusqu’à ce jour, chaque reportage part à la recherche du

« Comment faire pour le démasquer rapidement? »

« Comment faire pour ne pas s’empêtrer dans les mailles du filet? »

 » Qu’en sera-t-il de ma réputation quand j’aurai porté plainte? »

Pourquoi ne pas se poser les questions suivantes :

–           Pour quelles raisons qui leur sont inhérentes, ces jeunes filles sont-elles des cibles vouées à des prédateurs c’est-à-dire ne sont-elles pas reconnues par leurs parents?

–           Et que peuvent-elles faire pour ne plus l’être ?

Roberto Fradera, le 7 février 2016

Nos derniers articles